Le cas particulier de la Picardie
En 1956 le Nord et le Pas-de-Calais sont donc en grande partie à la portée du Beffroi de Lille.
En Picardie toutefois, le sud de la région capte Paris et le Nord reçoit Lille, mais Amiens et ses environs se plaignent d'être laissés de côté, seul un petit relais provisoire de 50 watts, installé sur le tout nouveau château d'eau de Coisy en juillet 1958, est reçu dans l'agglomération d'Amiens :
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Le château d'eau de Coisy, construit en 1958 et aussitôt
utilisé par la RTF jusqu'à la mise en service de l'émetteur
de Bouvigny sur le même canal F11-V en décembre 1959.
Modernisé, il est maintenant utilisé pour la téléphonie
mobile avec un pylônet et surnommé "La Tour Bleue".
Capture d'écran © Google Street View
La RTF ne parvient pas à retenir un emplacement satisfaisant pour couvrir la Somme et l'Aisne, tandis que le site de Bouvigny-Boyeffles est choisi pour remplacer le beffroi de Lille.
Document © Delcampe.fr
et © Modern Photo Sains (1960)
Avec en cadeau une colorisation "maison" de la photo ci-dessus :
Finalement, c'est ce même site inauguré en novembre 1959 qui hébergera, fait unique à la RTF, deux émetteurs 819 lignes bande III avec deux polarisations différentes : le canal F8A émettant en horizontal vers le Nord-Pas de Calais, et le canal F11 émettant en vertical vers la Somme et l'Aisne.
(NB : jusqu'en 1956, la Tour Eiffel avait eu elle aussi deux émetteurs avec deux polarisations différentes, mais avec deux standards différents et sur deux bandes différentes : en 441 lignes en bande I à polarisation verticale, et en 819 lignes en bande III en polarisation horizontale) :
Quelques années plus tard, en 1964, Bouvigny sera le premier grand centre émetteur de province (une fois de plus !) à bénéficier de l'arrivée de la Deuxième Chaîne de l'ORTF (Lyon l'ayant eu en même temps que Paris, mais seulement sur sa mini-Tour Eiffel de Fourvière, reçue seulement dans la ville et sa banlieue). Peut-être plusieurs facteurs ont-ils contribué à lui donner cette préférence : sa proximité de la Belgique déjà utilisatrice du 625 lignes flamand (en VHF certes, mais à polarité d'image positive et à porteuse audio en AM comme le 625 lignes français, et non pas en polarité négative et son FM), pour lequel de nombreux téléviseurs"ch'tis" multistandards étaient déjà en mesure de capter la nouvelle chaîne par simple adjonction d'un tuner et d'une antenne UHF. Mais, peut-être aussi, les compétences particulières du personnel technique lillois qui s'était illustré en juin 1953 en assurant le centre nodal et de répartition, avec conversion des images anglaises à 405 lignes du Couronnement, en images à 819 lignes vers Paris, et en 625 lignes vers la Belgique, les Pays-Bas, l'Allemagne et le Danemark... une prouesse technique à l'époque.
Haut de ses 300 mètres, Bouvigny fut donc le premier grand pylône français à être surmonté d'un cylindre d'une vingtaine de mètres contenant les antennes UHF diffusant la "Deux" sur une zone de réception moins grande qu'en VHF :
Document © Télé 7 Jours 1964
Bouvigny-Boyeffles, surmonté de sa nouvelle antenne UHF en 1964
Document © Delcampe.fr
L'émetteur de Bouvigny sera complété, pour ses émissions en UHF, par des émetteurs "intercalaires" comme celui-ci, sur le Mont des Cats près de Dunkerque...
Document © Delcampe.fr
... et au Mont-Lambert, près de Boulogne (qui complétait déjà la zone de réception de la "Une" sur le canal F4-V en bande I depuis septembre 1959), mais aussi à Maubeuge (Rousies), Valenciennes (Marly) et, pour le programme régional d'Amiens, à Hirson (Landouzy) et à Abbeville (Limeux).
Tous ces émetteurs "intercalaires" sont uniquement équipés pour la radio FM et la TV en UHF. Leurs emplacements sont soigneusement choisis pour "coller" au mieux avec les limites administratives qui aboutiront un jour à nos actuelles régions, et pour lesquelles l'ORTF a mis progressivement en place des C.A.T. (Centres d'Actualités Télévisées) dont ces émetteurs assureront une couverture optimale, tandis que les grands centres VHF comme Bouvigny avaient eu pour objectif premier de couvrir un maximum de population avec la plus grande zone de réception possible.
A la fin des années 80, la proximité de la Belgique, de l'Angleterre et des Pays-Bas a empêché Bouvigny d'accueillir des émetteurs pour La Cing et TV6 (puis M6), qui durent se contenter longtemps d'un émetteur local à Lambersart, limité à l'agglomération lilloise.
Depuis, le passage au tout numérique a permis à la station de bénéficier du même nombre de chaînes que les autres grands centres émetteurs de province.
Quant à la Picardie, elle possède ses propres émetteurs depuis 1969 à Saint-Just en Chaussée pour couvrir l'Oise et la Somme, à Limeux pour la région d'Abbeville, et, pour l'Aisne, à Hirson Landouzy mais aussi à Villers-Cotterets (Fleury) le tout premier émetteur UHF français à utiliser la polarisation verticale (voir ici).
Dans un prochain article, après un crochet par la Belgique et son 819 lignes spécifique, nous partirons pour l'Alsace dont le premier émetteur, provisoire, a fêté ses 60 ans le 30 septembre 2013. Bien que nous disposions de moins d'illustrations et de détails, nous découvrirons pourquoi la priorité a été donnée à cette région plutôt qu'à Lyon, initialement prévue pour le troisième émetteur français, mais qui dut attendre un an de plus pour bénéficier de la télévision.
















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