Je pense qu'il est utile de rappeler l'histoire de Max Grundig (merci à Helmut et Heinrich pour tous ces détails)
L'histoire d'un grand homme de Fürth qui est en fait de Nuremberg…
C'est le 7 mai 1908 au 3 Denisstrasse à Nuremberg que le couple marié Max Emil Grundig et sa femme Marie
attendent leur premier enfant. Il va s'appeler Max… La famille s'agrandit et l'enfant va avoir 3 sœurs: Wilhelmine,
Agnès et Klara. La situation économique n'est pas facile et en raison du décès prématuré du père, sa mère doit
subvenir aux besoins de la famille en tant qu'ouvrière d'usine. Après avoir fréquenté le lycée et obtenu son diplôme,
Max Grundig entame une formation commerciale dans sa ville natale de Nuremberg en 1922 auprès de l'entreprise
d'installation Jean Hilpert (technique d'installation de gaz et de conduites d'eau).
Max montre un grand intérêt pour les nouvelles technologies, notamment les postes de radio et aime bricoler à la
moindre occasion. A l'âge de 18 ans, il est autorisé à visiter la troisième grosse Deutsche Funkausstellung de Berlin
(grande foire allemande de la radio) au nom de son patron, Monsieur Hilpert. Un an plus tard, il est transféré à la
direction de la filiale de Fürth (anciennement C.Blödel). Le rachat de la société Blödel est une décision stratégique de
la part d'Hilpert afin d'obtenir les commandes du nouveau bâtiment de l'hôpital municipal de Fürth. Seules les
entreprises locales peuvent en effet recevoir des commandes de la ville. Bien que l'activité principale de la
succursale soit l'intendance, Max met en pratique toutes ses connaissances en matière de technologie
radiophonique et propose pour la première fois des récepteurs et leurs accessoires en vente dans l'ancien magasin
Blödel au 2 Blumenstrasse.
Il peut désormais subvenir aux besoins de sa famille avec un salaire décent plus un pourcentage sur les ventes. A
l'âge de 21ans, il épouse Berta Haag et leur fille Inge nait le 18 janvier 1930. Le divorce est prononcé peu de temps
après. Le 1 novembre 1930, un différend oppose Max Grundig à son patron Ludwig Hilpert sur les modalités de
rémunération mettant un terme à leur collaboration par la démission de Max. Il souhaite déjà créer sa propre
entreprise et trouve rapidement un magasin de taille suffisante au 4 Sternstrasse à Fürth.
Avec son ami Karl Wurzer, ils ouvrent la boutique le 15 novembre 1930 en tant que société en nom collectif inscrite
au registre du commerce du tribunal de grande instance de Fürth, numéro de dossier VIII/52 avec l'inscription
suivante: Radio-Vertrieb Fürth, Grundig & Wurzer. La société devient RVF. Les ventes au 4 Sternstrasse ne sont pas
mirobolantes. Malgré diverses campagnes publicitaires, il est difficile de gagner des parts de marché. Max Grundig
travaille seul au début. Il sert les clients et effectue les réparations nécessaires. Mais le bouche-à-oreille en raison
d'un service de qualité et peu cher se répand rapidement dans Fürth. L'embauche d'un employé va suivre
rapidement. Ses premières ventes de radios sont de marque Lumophon via le grossiste Weiler de Nuremberg. Karl
Wurzer n'est en réalité qu'un associé théorique. Après le rachat des ses actions, Max Grundig devient l'unique
propriétaire de la société le 21 juin 1934. La croissance du chiffre d'affaires exige bientôt un plus grand magasin avec
atelier qu'il trouve à proximité. L'ouverture est prévue le 21 juillet 1934 dans un lieu commercial privilégié au 1
Schwabacher Strasse.
Parce qu'il existe différents réseaux électriques à Nuremberg et à Fürth (alternatif et continu), les ventes de radios
augmentent malencontreusement. Quiconque déménage d'une ville à une autre ne prête pas forcément attention à
son alimentation électrique et peut vite détruire le transformateur d'alimentation de son poste. L'investissement de
Max Grundig pour des bobineuses dans son atelier du premier étage permet de recâbler les éléments défectueux. La
poursuite du succès commercial est imparable et l'investissement va jusqu'à l'achat de véhicules pour les
installateurs. Max s'offre d'ailleurs une voiture à ce moment-là. Il reste fidèle à ses vieux amis en particulier au café
Fink et cela aura des conséquences. Il y rencontre la soprano Annelise Jürgensen avec qui il se marie le 3 décembre
1938. Les ventes, la production et les réparations battent leur plein, mais la Seconde Guerre mondiale approche à
grands pas…
Max Grundig est initialement considéré UK (indispensable) parce que son entreprise est classée indispensable à
l'effort de guerre, mais passe KV (apte à la guerre) en 1941. Son absence de la société oblige ses employés à assumer
seuls la charge de travail et ses 3 sœurs à assurer la gestion de RVF.
Les ventes du grand public chutent pendant la guerre, compensées en partie par la production croissante
d'armements électriques et la réparation du matériel de communication militaire. Avec les raids aériens sur
Nuremberg en 1943, Max Grundig fait déménager ses ateliers dans la salle de danse et dans le bowling d'un petit
village à côté de Fürth baptisé Vach. Son activité militaire l'oblige à construire des transformateurs et des
détonateurs électriques ainsi que les dispositifs de commande pour les fusées V1 et V2 jusqu'à la fin de la guerre.
En raison de l'importance croissante de la société RVF dans l'économie de guerre, le caporal Max Grundig est
reclassé UK (indispensable) et libéré du service militaire en fin d'année 1943. Dès 1944, 50000 petits
transformateurs sont déjà fabriqués et les sociétés AEG et SIEMENS frappent à la porte de RVF pour croitre leur
production de transformateurs. Le personnel est de plus en plus nombreux et des travailleurs étrangers ukrainiens
sont sollicités pour l'aider à reconstruire son entreprise.
En mai 1945, Max Grundig fait rapatrier les machines et les fournitures de Vach et ouvre son magasin avec
seulement quelques employés au 24 Jakobinentrasse qui est une ancienne usine de jouets abandonnée à Fürth. Bien
sûr, la tentation de vendre des radios le démange, mais ce n'est plus aussi simple. La construction de ce genre
d'appareil propice à la propagande doit être dorénavant soumise à l'approbation des autorités militaires alliées et
leur vente exige un bon d'achat… Il obtient tout de même une licence commerciale pour sa société RVF le 7
novembre 1945.
Max Grundig a cette idée géniale de concevoir un kit de construction radio PO GO OC baptisé Heinzelmann sous
forme de jouet sans les 2 tubes nécessaires à son fonctionnement. Libres à chacun de trouver ensuite les lampes
facilement par le biais du marché noir. C'est le début du succès d'après guerre pour RVF. La production en série
commence en août 1946 pour être livrée début 1947. Max a un besoin urgent d'espace pour les volumes de
production en constante augmentation de l'Heinzelmann et des futures unités de fabrication. À cette fin, il achète un
terrain sur la Kurgartenstrasse en mars 1947 sur un site qui abritait autrefois une station thermale et y construit son
usine. A partir d'octobre 1947, une première radio de la nouvelle gamme Weltklang avec trois gammes d'ondes, sort
des ateliers.
Après la réforme monétaire de 1948 où le Deutsche Mark remplace le Reichsmark, la société, RVF-Elektrotechnische
Fabrik devient Grundig Radio-Werk GmbH. Son expansion rapide répond à la demande du marché de masse au
début des années 50. En 1949, la production mensuelle est de 12 000 appareils, en 1951 de plus de 34 000, en 1953
déjà de 39 900 et en 1960, la production passe à 70 800. A la fin de l'année 1945, 30 employés produisent et vendent
contre presque 300 en 1947, 5000 en 1952 d'où sortira le 12 mai de l'usine de Fürth en Bavière le millionième poste
de radio et enfin 31000 collaborateurs en 1973…
Après avoir absorbé la marque Lumophon Werke de Nuremberg, Grundig élargit sa gamme de produits y compris de
magnétophones en 1951, pour lesquels des usines de production sont installées à Bayreuth et à Nuremberg vers la
fin de la décennie. Cela comprend également les téléviseurs et autres appareils électroniques grand public. L'année
1952 voit l'industriel allemand devenir le plus grand fabricant de radios en Europe et de magnétophones au monde.
Grundig est désormais une marque mondiale qui propose en série dès 1953, le tout premier téléviseur Receiver 210
de 36cm, 10 canaux VHF et 18 lampes pour un prix inférieur à 1000 DM. Il succède au prototype Fernsehempfanger
080 Kleeblatt de 1951 au format 36cm, 6 canaux VHF, châssis à 19 lampes, préproduit en 94 exemplaires pour 1800
DM avec meuble. En 1957, la marque allemande reprend la majorité des parts des sociétés Triumph et Adler. Dès
lors, l'entité Grundig produit également des machines à écrire et de bureau en plus des magnétophones, postes de
radio et de télévision.
En 1963, Max Grundig devient citoyen d'honneur de la ville de Fürth et créé la fondation de la famille en 1970. Il
transfère la majorité des actions de la société, transformée en Grundig Werke AG dès 1972, à la fondation. En tant
que président du conseil de surveillance de l'AG et président de la Fondation, Max continue à avoir son mot à dire
dans la gestion de l'entreprise.
Lors de la première Exposition Radio Internationale à Berlin en 1971, Grundig présente son prototype de
magnétoscope couleur VR2000 au standard VCR grand public, commercialisé un an plus tard avec quelques
évolutions sous la référence BK2000. Le 12 octobre 1978, la première usine allemande de magnétoscopes est
inaugurée à Nuremberg-Langwasser. En 1978, Max réalise qu'il dirige 37500 employés dans 31 usines. Au début des
années 80, la société emploie jusqu'à 38 460 personnes.
En 1980, Max Grundig épouse sa troisième femme, Chantal Rubert, née en France.
La croissance de Grundig semble imparable, mais la mondialisation du marché et notamment les importations
d'Extrême-Orient vont avoir raison des constructeurs européens de télévision. Les industries de l'optique et de la
photo sont déjà bien impactées et les choses vont empirer pour l'électronique grand public… Dès 1982, Grundig
recherche une fusion stratégique de tous les fabricants européens d'électronique notamment avec Philips et
Thomson France. Ce sera un échec sur toute la ligne alors que le groupe français avec l'approbation de François
Mitterrand y était plus que favorable. Max Grundig se retire de la société en 1984 et vend la majorité de ses actions
au groupe Hollandais Philips qui gère la partie commerciale. Le développement technique des téléviseurs reste
l'apanage des ingénieurs allemands. Max demeure cependant associé à sa société en tant que président du conseil
d'administration de la fondation.
Dans l'une de ses dernières initiatives entrepreneuriales, Max Grundig crée une chaîne d'hôtels de haute qualité, le
Forsthaus Dambach, le Vista Palace à Monaco, des maisons à Salzbourg et à Fürth et le Schlosshotel Bühlerhöhe
près de Baden-Baden, agrandi pour inclure l'hôpital privé renommé Max Grundig Klinik. En 1988, Max Grundig
reçoit la Médaille du mérite du Bade-Wurtemberg. Il décède le 8 décembre 1989 à Baden-Baden laissant deux
épouses divorcées et sa troisième et dernière femme Chantal Rubert ainsi que ses deux filles.
L'entreprise est trop endettée pour s'en sortir et trop petite pour combattre seule les géants japonais. Les pertes
s'accroissent et le licenciement de masse fait des ravages. Philips ne réussit pas à juguler l'endettement et renonce à
gérer la société allemande en 1997. La famille Grundig assiste impuissante à la déchéance du groupe… La célèbre
marque d'outre-Rhin dépose le bilan le 1 juillet 2003. Aujourd'hui, le musée de la radiodiffusion se trouve au siège
social de la Kurgartenstrasse de Fürth et le bureau exécutif de Max Grundig est devenu une cafétéria.
Grundig Intermedia GmbH est désormais détenue à 100% par la société turque Arçelik, qui fait partie de Koç
Holding, depuis 2007. Les téléviseurs LCD sont fabriqués sous la marque Grundig dans une usine d'Istanbul plus
connue sous le logo Beko, pour laquelle d'anciens ingénieurs de Grundig ont repris la gestion de la qualité. A
Nuremberg, il y a encore une équipe de vente et des parties du département de développement avec environ 140
employés.
C'est la fin d'une histoire commencée en 1930 et peut être une renaissance pour la marque…
Tontonvé
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