© "l'envers du petit écran" par P.Duru,éditions Gauthier-Villars 1966
suite

L'ÈRE DE LA TELEVISION ÉLECTRONIQUE

"C’est l’ère des applications, des « aménagements » du tube à rayons cathodiques.
Nous nous contenterons de tracer ici les grandes lignes de cette évolution.
Après les premières observations de PLUCKER en 1858 – dont nous avons parlé tout au début - viennent les travaux de Wilhelm HITTORF, l'élève de PLUCKER (1868), puis ceux de VALEY (1871).
En 1897 Ferdinand BRAUN étudie les moyens de concentrer et de dévier le faisceau.
L’invention de l’oscillographe cathodique est la toute première application du tube à rayons cathodiques ; elle ne date que de la fin du siècle dernier.
Il fallut attendre 1907 (proposition de Boris ROSING) pour que germe l’idée d'une application de l’oscillographe cathodique au récepteur de télévision.
Mais, là comme ailleurs, les réalisations n'interviennent qu'après la première guerre mondiale : il fallait, que l’on puisse faire
varier l’intensité du faisceau d’électrons afin de disposer sur l'écran d’un point lumineux d’éclat variable; il fallait aussi que l’on dispose des moyens appropriés (champs électriques ou magnétiques) pour balayer convenablement, ligne par ligne, toute la surface de l'écran.
Le problème du contrôle de l’intensité du faisceau électronique fut résolu par WEHNELT en 1903.
La solution au problème du balayage mit tout d'abord à contribution des moyens mécaniques. Les dispositifs électroniques n'apparurent qu'en 1928 : études de Van DER POL sur les oscillateurs à relaxation ( En langage électrique nos pompes de déviation sont des relaxateurs.)
La première réception sur oscillographe cathodique eut lieu au printemps de 1926. C’est Edouard BELIN qui la réalisa avec HOLWECK.
« D'après certains auteurs - écrivit plus tard Edouard BELIN - cette expérience serait la première, au cours de laquelle l’image complète et animée d'un personnage serait apparue, avec toutes ses valeurs sur 1'écran du tube cathodique. Mais l’exploration (émission) par un système mécanique à deux miroirs constituait encore une lacune, qui fut peu après comblée par d'autres expérimentateurs plus désignés et mieux placés que nous pour atteindre le but final »
Parmi les autres expérimentateurs de cette méthode, citons DAUVILLIERS, VALENSI et surtout ZWORYKIN qui en 1933, grâce à un oscillographe perfectionné put recevoir des images dont les dimensions atteignaient 20 X 20 cm.
Depuis, les dimensions de l'écran se sont accrues: tubes à écran circulaire de 22 puis de 31 centimètres vers les années 50, tubes rectangulaires aux angles très arrondis de 36, de 43, de 54 centimètres, tubes rectangulaires aux angles vifs de 48, 59, 65 et 70 centimètres aujourd'hui.
En même temps, diminuait l’encombrement : téléviseurs profonds, monumentaux, inesthétiques, des années 50, remplacés par les téléviseurs extra-plats d'aujourd'hui.
Nous terminerons avec les applications du tube cathodique à la prise de vue. Le problème - nous [le verrons] avec l’iconoscope - était encore plus délicat.
Les premiers essais furent faits avec des films; ils n'offrent que peu d'intérêt et n’étaient susceptibles d'aucun développement.
On plaçait le film au contact de la face avant du tube cathodique; le point lumineux mobile servait de source d’éclairage; la modulation de la lumière envoyée au traducteur lumière-courant (une cellule photo-électrique) était due aux variations de transparence du film.
Le dispositif d’analyse et le traducteur lumière-courant étaient donc encore indépendants.
Il fallut attendre le début des années 30 pour que l’idée de « l'oscillographe émetteur » commence à prendre forme avec les travaux de CAMPBELL-SW1NTON.
Le traducteur lumière-courant était formé d’une série de cellules photo-électriques disposées côte à côte, sur un écran illuminé par 1'image à transmettre. Cet écran était fait en matière isolante comme un rayon de cellules d'abeilles. Dans chaque alvéole se trouvait une matière photo-sensible et le faisceau cathodique mettait successivement en circuit toutes les cellules photo-électriques de l'écran. `
Cette fois le dispositif d'analyse et le traducteur lumière-courant appartenaient donc à la même unité. Mais les difficultés de réalisation étaient telles que l'on n’était encore parvenu à aucun résultat en 1933. Le pas décisif fut franchi par ZWORYKIN, le père de la télévision moderne, auquel revient l’honneur d'avoir réalisé alors l’iconoscope qui fut le premier tube de prise de vue digne de la télévision actuelle. Auparavant il avait expérimente un autre dispositif, dû à FARNSWORTH, avec lequel, il avait obtenu déjà de très bons résultats : images de 20 x 20 cm ne comptant pas moins de 4 000 points (la grille photo-électrique avait quatre mailles au millimètre).
Le tube de prise de vue
Il ressemble par certains côtés au tube image, du moins par son contenu : on y aperçoit très nettement un écran et un canon.
L'écran n'est pas un revêtement intérieur, c'est une vraie plaque suspendue dans une ampoule cylindrique en verre transparent.
Le canon, comme dans le tube image, est logé à l’extrémité d'un col de verre, mais il se trouve cette fois dans une position inclinée par rapport à 1'axe de l’ampoule. Contrairement à ce qui se passe pour le .tube image il n’y a pas de revêtement interne sur la paroi mais une ceinture annulaire constituée d'un fil de métal qui fait le tour de l’ampoule, et communique avec l’extérieur par une broche métallique sortant par une boursouflure du verre. Ce curieux ensemble a des dimensions moins importantes qu'un tube image, même de petit modèle; aussi le verre est-il moins épais. Il n'empêche qu'il supporte lui aussi la pression atmosphérique, car on a fait le vide à l'intérieur.
Ce tube de prise de vue est l’iconoscope que l’on doit au professeur ZWORYKIN

L’iconoscope présentait encore bien des imperfections. Les recherches s’orientèrent donc vers un super-iconoscope (LUBSINSKY et RODDA, 1936) qui remédiait à quelques-uns des défauts présentés par l’appareil de ZWORYKIN.



Tous les problèmes n'étaient cependant pas résolus pour autant: la grande vitesse des électrons balayant la mosaïque donnait lieu, au niveau de celle-ci, à des phénomènes d’émission secondaire. Pour faire un nouveau pas en avant, il fallait donc concentrer et dévier des électrons animés de vitesses lentes, ce qui est plus difficile qu'aux vitesses élevées.
On ne sut guère le faire correctement qu'en 1939, époque à laquelle apparut un nouveau tube de prise de vue, dû aux travaux
de IAMS et ROSE : l’orthicon.
Puis l’appareil à son tour, fut supplanté par un autre : l’image-orthicon, perfectionnement du précédent auquel on doit les images remarquables de la télévision d’`aujourd'hui.
Les deux derniers nés sont le vidicon et le plumbicon
Avec eux, nous sommes en pleine actualité." ( [1966])