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  1. #11
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    juillet 2013
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    Citation Envoyé par BAISIN Voir le message
    (...) l' émetteur Ligure situé au dessus de Bordighera, et San Remo, qui utilise le surprenant canal Italia C ou E4 A, en Bande I VHF élargie jusqu' à 88 Mhz(82,25 Mhz/87,75 Mhz ), en norme CCIR pour l' Italie( ce canal a été, aussi utilisé sur l' émetteur de EREMO Torino, jusqu' en 2007, ou 2008, environ, et qui portait très loin ! )
    A la découverte du "canal C" italien

    Précisons d’abord qu'en radio-télévision la bande I s'arrête à 68 MHz.

    La bande II, assignée à la radiodiffusion, s'étend de 87,5 à 108 MHz.
    Elle est abusivement appelée "bande FM" car c'est le procédé de la modulation de fréquence qui a été finalement adopté par tous les pays du monde, après des années d'expériences parallèles, dans cette même bande II, en modulation de fréquence et en modulation d'amplitude.

    Ce fut notamment le cas par la BBC après-guerre et c'est pourquoi officiellement, les Britanniques dénommaient cette bande "VHF".

    Dans les années 70, leurs deux stations "Radio 2" (musique légère, variétés, théâtre, sports) et "Radio 1" (pop, rock pour les jeunes) se partageaient un seul réseau FM à elles deux. On entendait souvent des annonces de ce genre sur Radio 2 : "Now a play on Radio 2 on 1500 m Long Waves, and on VHF, Radio 1 with Noel Edmonds" = "Et maintenant une pièce sur Radio 2 sur 1500 m G.O. et sur la modulation de fréquence, Radio 1 avec Noel Edmonds"...

    Les Allemands (de l'Ouest, à l'époque) en firent de même et la dénommèrent "Ondes Ultra Courtes" : "Ultra Kurz Wellen", en abrégé "UKW" sur les récepteurs allemands. Dépossédés de nombreuses fréquences en ondes moyennes à la fin de la guerre, ils s'étaient très rapidement tournés vers cette technologie par ailleurs parfaitement adaptée à leur fonctionnement fédéral, très régionalisé, notamment en radio-télévision : alors que seules quelques grandes villes disposaient d'un émetteur ondes longues ou moyennes (Berlin, Stuttgart, Francfort, Münich...), chaque Land put ainsi très rapidement mettre en place ses propres réseaux de radio, notamment de musique classique et d'informations régionales, très prisées du public allemand.

    Dans les années 50, les Français, pour se distinguer des autres (une fois de plus !) décidèrent (pendant longtemps) de l'appeler "Gamme M.F." alors que d'autres pays, une fois la modulation de fréquence bien implantée au niveau mondial, adoptèrent le sigle "F.M." pour les émissions en... "Fréquence Modulée", adaptation francophone logique de la terminologie anglophone "Frequency Modulation". Dans des anciens "Semaine Radiophonique" on retrouve le terme "Fréquence Modulée" sous les fréquences des émetteurs allemands reçus en Alsace.

    Ces précisions réjouissantes apportées, il en découle que toute émission de radio-télévision qui se trouve entre 68 MHz et 87,5 MHz en Europe de l'Ouest est "hors bande" (en ex-URSS, la bande attribuée par l'OIRT - Organisation Internationale de Radio -Télévision, équivalent de l'UER, allait autrefois de 65 à 74 MHz, et au Japon elle va de 76 à 95 MHz). Notre ancien "canal C" italien était donc hors bande, et non pas en bande I ni en bande II.

    Pourquoi ces fréquences bizarres, 82,25 MHz pour la vidéo et 87,75 MHz pour l'audio ?

    Tout simplement parce qu'à la fin de la guerre de 1939-1945, les Américains avaient testé près de Turin un ancêtre de notre actuelle "prévention des dommages collatéraux" lors de la reprise de Turin occupée : un émetteur de télévision, installé sur les hauteurs voisines, les collines dites de l'Eremo, permettait aux bombardiers américains de mieux situer les objectifs et d'épargner les habitations, hôpitaux etc. C'était purement expérimental et l'on n'a pas de détails sur la façon exacte dont çela se passait. Ces éléments ont été révélés au moment de l'arrêt de l'analogique à Turin et au passage à la TNT.


    Vus du centre-ville de Turin, les deux pylônes sur les collines de l'Eremo
    Document © www.radiomarconi.com

    Une fois Turin libérée, les Américains préférèrent laisser sur place cet encombrant matériel et l'offrir aux Italiens. Cet émetteur à la norme M nord-américaine (525 lignes, canaux de 6 MHz, 30 images/seconde sous secteur en 60 Hz) avait été construit par General Electric avec les fréquences du canal A6 américain : vidéo 83,25 MHz - audio 87,75 MHz.


    L'émetteur General Electric (canal A6) laissé par les Américains à la fin de la guerre
    Document © www.radiomarconi.com

    Les Italiens, pour l'adapter aux conditions de fonctionnement en Europe (sous secteur 50 Hz, définition passant à 625 lignes avec canal de 7 MHz), n'eurent qu'à seulement abaisser la fréquence vidéo de 1 MHz, celle en audio restant sur 87,75 MHz dans la bande II assignée à la radiodiffusion. Après quelques expériences à Rome et Milan en 441 lignes et bande I sous Mussolini, abandonnées pendant la guerre, cet émetteur devenait donc le premier du futur réseau de télévision en 625 lignes norme B de la RAI, qui démarrera officiellement en 1952 après plusieurs années d'expérimentation à Eremo.


    L'émetteur modifié en cours d'essais sur le canal C
    par les techniciens de la
    RAI en juillet 1949

    Document © www.radiomarconi.com

    Pourquoi ce nom de "canal C" ?

    Tout simplement parce que l'Italie étant un pays géographiquement étroit, les ingénieurs de la RAI, au lieu d'adopter les canaux E2 à E4 en bande I et E5 à E10 en bande III, décidèrent de sacrifier des canaux dans ces deux bandes pour permettre un voisinage plus facile d'émetteurs régionaux, sans interférences mutuelles sur des canaux jointifs : en bande I au lieu des trois canaux il n'y en eut plus que deux, baptisés "canaux A et B", et cinq au lieu de six en bande III : "canaux D à H" - un 7ème (le "canal H1") étant rajouté par la suite à la place des E11 et E12.

    C'est donc fort logiquement que ce canal situé entre les bandes I et III en Italie reçut la lettre C. Toutefois, du fait de ses caractéristiques, seul l'émetteur principal de Turin fut autorisé à l'utiliser avec une puissance de 16 kW crête-image et de 3,2 kW pour l'audio, soit environ 100 kW P.A.R. Ce canal était utilisé uniquement par des émetteurs de faible puissance dans le reste de l'Italie, dont, justement, Bordighera. Mais ce dernier fut dès que possible remplacé par un émetteur UHF pour éviter les interférences avec les radio-communications utilisant en France voisine les fréquences comprises entre 68 et 87,5 MHz (divers services publics, notamment : EDF, SNCF, police, pompiers...). Quelques télévisions locales privées italiennes, lorsqu'il n'y avait pas d'autre canal disponible, l'utilisèrent aussi, mais toujours avec de faibles puissances.


    Surmontée du panneau UHF large bande favori des antennistes
    turinois, une antenne canal C avec dipôle à
    gamma match de 1,75 m

    Document © www.radiomarconi.com

    On notera aussi, qu'un autre pays, pendant plusieurs années, a utilisé le canal C : l'Albanie, qui auparavant, jusqu'à la fin des années 70, utilisait dans sa capitale de Tirana un émetteur expérimental de 20 Watts sur le canal R2 (vidéo 59,25 MHz - audio 65,78 MHz). Celui-ci sera remplacé par la suite par un émetteur de 50 Watts sur le canal C. Plus tard, dans les années 80, lors du développement du réseau dans tout le pays, Tirana émettra sur ce canal C avec une P.A.R. de 100 kW.

    Un amateur de DX-TV, Hepke van der Ploeg, a enregistré plusieurs fois ce canal C albanais aux Pays-Bas il y a plusieurs années, voir ici (durée 37 secondes).

    Entre temps, de son côté la RAI avait mis en service pour les nouveaux téléviseurs, non équipés du canal C, un autre émetteur RAI Uno à Eremo sur le canal 55 UHF avec 400 kW de P.A.R. Alors qu'au moment du passage (très tardif) à la couleur PAL à la fin des années 70, le canal C est passé sans problème au PAL, il n'en a pas été de même avec les émissions en stéréo, les équipements étaient de conception trop ancienne pour être modifiés en conséquence.


    Vue rapprochée des deux pylônes de Turin - Eremo. Les antennes du canal C sont sur
    celui de droite, juste sous le cylindre UHF torsadé, et au-dessus de celles de la radio FM.

    Document © www.radiomarconi.com

    Depuis, en raison du très grand nombre de chaînes privées en Italie, la TNT émet aussi en bande III, mais comme pour la bande I, le canal C a été définitivement abandonné après une soixantaine d'années de fonctionnement.

    Lorsque le "Tour de France" sera arrivé à sa dernière étape (via l'Algérie de l'époque du 819 lignes de la R.T.F. et le Maroc de celui de la TELMA), il sera très intéressant de partir à la découverte de l'histoire de la télévision dans les autres pays, et notamment l'Italie.

    De nombreux éléments qui précèdent (notamment les photos et les détails historiques), proviennent du fabuleux site italien www.radiomarconi.com, particulièrement complet et détaillé, auquel il convient de rendre hommage.

    Si votre navigateur traduit les pages internet, même imparfaitement, n'hésitez pas à aller vous y promener, il comporte des illustrations d'un intérêt historique certain.
    Dernière modification par Colorix ; 23/09/2018 à 18h51.
    Colorix
    Louis Marie Foratier

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    décédé en janvier 2020

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