23 heures 15 : La Farlède en plein travail
Où passe l'image entre Saint-Ouen et l’imprimerie toulonnaise?
Son itinéraire se résume ainsi:Saint-Ouen - Buttes Chaumont - Marseille Grande Etoile - La Loube -
Cap Benat - Relais de Solliès – La Farlède.
Il a suffit d'installer des paraboles à Sicié et Solliés et naturellement sur le toit des imprimeries reliées pour que les chemins soient tracés.
Pierre Gomez, chef de l'antenne TDF de Toulon, a mis au point la partie départementale de cette transmission de fac-similés et en surveille le bon fonctionnement avec une extrême attention. Il est responsable dans le Var du District Réception, du Groupe d'assistance technique et des émetteurs du Cap Sicié, du Cap Bénat, de Pignans, de Notre-Dame-des-Anges. Cette expérience nouvelle l'a passionné.
« Nous avons le souci que ça marche bien, dit-il. Il a fallu un assez long travail de préparation avant le premier numéro présentable, mais maintenant il ne reste guère qu'à garder l'œil dessus et à fixer plus solidement les paraboles. Dès qu'il fait trop de vent je vais de l'une à l'autre avec une certaine inquiétude. Jusqu'à ce jour pas d'ennui. Le taux de panne est nul et je crois qu'i| n'a été nécessaire qu'une ou deux fois par temps de grand orage de doubler une page en transmission. »
La Nouvelle Impression Toulonnaise, dans la banlieue industrielle de Toulon, au bout d'un chemin de terre terriblement cahoteux. Une formidable rotative offset et 150 tonnes de papier occupent les trois-quarts du grand hangar central. Salles de développement photographique, bureaux et, au fond, baignée de lumière rouge, une machine Siemens semblable à celles de Saint-Ouen, bouton « réception » poussé.
Cela sent bon ici le papier journal. Pourtant d'autres senteurs plus chimiques s'imposent dont la somme ressemble assez au parfum de la violette. Un peu déroutante, une imprimerie sans plomb. La jeune équipe s'en passe très bien, crée des traditions nouvelles et va de l’avant entre ses plaques sensibles et sa «roto» géante. Deux jeunes directeurs. Quand l'un voyage vers la clientèle, l'autre ne quitte pas l'atelier.
Ce soir, René Nlouysset demeure, tandis que Serge Lecomte chemine. Frère de l’international de rugby, Mouysset porte un nom à ne pas trouver oiseuse la composition du pack français pour France-Angleterre, mais il se soucie surtout pour I'instant de l’imprimer. Les deux premières pages envoyées par Saint-Ouen étaient à peine sorties sur films de la Siemens que Pierre Gomez se trouvait déjà là. Serein comme la météo du jour. Ce n'est pas ce soir que le taux de panne s'éloignera vraiment de zéro. A son aisance dans le dédale des bobines, des couloirs et des laboratoires divers. on devine que Gomez a passé là plus d'un moment à attendre la preuve papier que tout avait bien marché.
Minuit 20 : la « roto » démarre
Les films impressionnés portant chacun deux pages sont conduits vers un « révélateur » dans lequel ils resteront 2'30" suivant qu'ils recèlent ou non des photographies aux noirs nombreux.
Nous avons vu s'enrouler les films vierges sur le cylindre de la Siemens, entendu Saint-Ouen annoncer les envois, attendu que la magie hertzienne opère et regardé l'équipe préparer les plaques « révélées » pour le double décalque de la presse offset.
Minuit 20: toutes les plaques assujetties sur les cylindres idoines, les bobines commencent à se dévider dans le vacarme et le premier de ces mille numéros perdus, pour l'essai, qu'un imprimeur ne regarde jamais sans regret, sort tout plié, tout neuf, pour annoncer aux Toulonnais que le XV de France ira sans Astre essayer de battre les Anglais.
Les servants de la rotative, dans l'habituel ballet du réglage, volent de leurs cylindres aux numéros frais jusqu'à ce que l'encrage soit parfait. Le premier « bon ›› numéro, avec ses caractères superbes de précision, fait honneur à l'imprimerie moderne.
Dans la cour, des camionnettes des Nouvelles Messageries de la Presse Parisienne attendent leurs ballots ficelés automatiquement pour les distribuer dans le Var et les départements circum-voisins au cours de la nuit.
Et c'est ainsi que le boulanger de Montrouge et l'ouvrier de l'Arsenal amateurs de rugby ont pu lire ensemble un 17 février avec soulagement: « La grippe d'Harize n'est plus qu'un mauvais souvenir et les coquards de Cholley sont en bonne voie de résorption »›.
Le « flan » peau de chagrin
L' " Equipe " vend maintenant en moyenne 20 % de plus dans la région provençale et les transmissions restent quasiment idéales. Mais la préparation fut rude et les numéros « zéro » surabondants. André Poiriault, Pierre Gomez et René Mouysset ont connu avant l'exemplaire réussi du 1er ' octobre 1976 une période éprouvante.
Le carbone, d'abord. Il ne «prenait» pas bien. L'ingénieur italien, auteur des machines Diapress, se mit à l'œuvre et trouva rapidement la bonne formule.
Le format ensuite. Celui de l' « Equipe » parisienne débordait, une fois déroulé de tous les cylindres intermédiaires entre Paris et rotative puis projeté sur papier. La légère distorsion de la photographie
sur courbes remplissait les marges de façon fort disgracieuse. On rogna un peu sur le format parisien.
Enfin, avant le système de repères adopté, il était épineux de centrer la page avec rigueur sans qu'el|e aille buter tout en bas ou s'échapper par le haut.
Après quelques semaines d'ajustage patient et pas mal de numéros. « pour du beurre », il fut
décidé d'affronter le jugement du public.
Paraboles, oscilloscopes, plastiques, billes d'acier et vague parfum de violette... les anciens typographes ont de quoi nourrir des mélancolies. Les moines copistes allemands ont dû pousser aussi quelques soupirs vers 1450 devant la Bible « à quarante-deux lignes » d'un certain Gütenberg.
Fernand Redon
(1) Intoxication par le plomb ou les sels de plomb.
(2) Boites divisées en casiers et contenant les caractères d'imprimerie. Le haut de casse contient les caractères moins fréquemment employés (capitales, lettres accentuées); le bas de casse renferme les caractères courants. « Composer en cap » = composer en majuscules ; « composer en bas de casse » (ou b.d.c.) = composer en minuscules.
(3) Dernière épreuve, faite à la brosse, lorsque la mise en page du journal est terminée.
(4) Carton recouvert d'un enduit épais que I 'on applique humide sur des caractères mobiles afin d'en prendre l’empreinte pour le clichage.
Le moule ainsi obtenu après séchage s"appelle également « flan ».
(5) Machine à rogner le papier
Les avatars du Var !
Le Cap Sicié de nos jours :
http://forum.telesatellite.com/showt...ll=1#post33758





Répondre avec citation
Liens sociaux