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  1. #1
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    Bien avant la TNT... Les antennes d'émission TV en France dans les années 50-60

    AVANT-PROPOS


    Bonjour et bienvenue,

    Les messages qui suivent concernant les débuts de la télévision à Paris, Lille, Strasbourg et Lyon, ont été initialement postés dans le
    "Forum Satellite", sujet "Photos d'antennes drôles, hors norme..." créé et animé par notre sympathique Cricri.

    Néanmoins, ces antennes d'émission, même si elles sont
    "hors norme", relèvent plus de la TNT (qu'elles diffusent presque toutes désormais, sauf celles qui n'émettent plus, telles Lille-Beffroi ou Strasbourg-Lauth).

    Aussi, pour lire en continu cette saga du
    "Tour de France des antennes d'émission des années 50-60", il m'a paru utile, sur la suggestion de quelques uns, de lui consacrer un sujet spécifique dans le présent forum

    Le
    "Tour de France des débuts de la télévision" suit l'ordre chronologique d'ouverture des émetteurs principaux par la RTF pour son réseau 819 lignes, de 1949 à 1961. Il est illustré par des photographies, des articles de presse, des documents techniques et même des copies vidéo de reportages contemporains (inaugurations d'émetteurs, de stations régionales, événements télévisés...).

    Dans certains cas
    nous serons amenés, d'une part à montrer l'évolution, depuis cette époque, de ces émetteurs dans les décennies qui ont suivi (arrivée de la Deuxième Chaîne et de la couleur, etc) mais aussi, pour garder une certaine cohérence, nous pourrons être amenés à présenter simultanément des émetteurs VHF associés ou émetteurs intercalaires UHF mis en service plus tard dans une même région.

    Voici donc, sous réserve de modifications pendant ce parcours (une étape supplémentaire étant notamment prévue pour l'Algérie, équipée en 819 lignes par la
    RTF dès 1956, et une autre au Maroc évoquant l'éphémère existence de la "Telma" dans les années 50), la carte de ce "Tour de France"
    dont chaque étape correspond à la date de mise en service de l'émetteur régional principal :





    Cliquer sur la carte ci-dessus ou ici pour l'afficher en grande taille, bien plus lisible

    Document RTF
    . Source : "La sociologie politique et la télévision"
    par Serge Antoine et Jean Oulif
    in Revue française de science politique (1962)
    téléchargeable en PDF ici ou à défaut ici (taille 3 Mo)
    © Collections Persée.fr


    Liens directs vers les étapes parcourues à ce jour :
    Un grand merci à kiki37 pour le recensement et le mise en liste de tous ces liens qui vous permettent d'accèder directement à la région de votre choix..

    Il nous prépare aussi un tableau encore plus détaillé de ce
    Tour de France, qui sera mis en ligne prochainement.


    a) Liste chronologique

    Nord - Pas de Calais (et Belgique )
    Picardie
    Alsace (et Télésaar )
    Rhône – Alpes
    Provence
    Côte d'Azur (et TMC )
    Corse
    Lorraine (et Télé-Luxembourg )
    Champagne-Ardenne
    Bourgogne
    Franche-Comté

    Centre-Val de Loire
    Normandie

    Bretagne (en cours)


    b) Liste alphabétique

    Alsace (et Télésaar )
    Bourgogne
    Bretagne (en cours)
    Centre-Val de Loire
    Champagne-Ardenne
    Corse
    Côte d'Azur
    Franche-Comté
    Lorraine (et Télé-Luxembourg )
    Nord - Pas de Calais (et Belgique )
    Normandie
    Picardie
    Provence
    Rhône – Alpes

    c) Le 819 lignes à nos frontières


    Belgique
    Sarre (Telesaar)
    Monaco (TMC)
    Luxembourg (Télé-Luxembourg)


    ---------------------
    AVERTISSEMENT : L'hébergeur (Free) ayant supprimé le stockage des documents-images de Colorix, celles-ci sont remises progressivement, malheureusement certaines n'ont pas été retrouvées ni les vidéos
    Merci pour votre compréhension
    Dernière modification par kiki37 ; 31/03/2022 à 20h21.
    Colorix
    Louis Marie Foratier

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      Réclame

       
       

  2. #2
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    Les antennes d'émission TV en France dans les années 50-60 : Paris Tour Eiffel

    A tout seigneur tout honneur, le départ de notre "Tour de France" se doit d'être donné depuis le plus ancien émetteur TV français : la Tour Eiffel qui reçoit ses premières antennes en 1935 pour des émissions d'essai en 60 puis 180 lignes à analyse mécanique, avant de passer en 1937 au 455 lignes tout électronique jusqu'au sabotage des installations avant l'entrée des Allemands dans Paris en 1940.

    En 1943-1944 ceux-ci installent un émetteur au standard 441 lignes allemand. La France bénéficie alors d'un superbe centre de télévision rue Cognacq-Jay qui servira jusqu'aux années 80 pour les trois chaînes nationales de télévision, son concepteur visionnaire, Kurz Hinzmann, ayant refusé de le saboter. En reconnaissance la France lui attribuera une pension de fonctionnaire de la RTF.


    Les émissions 441 lignes sont doublées à partir de 1949 par un autre émetteur fonctionnant totalement indépendamment en 819 lignes, haute définition retenue pour le futur réseau national. Il n'existe à l'époque aucune passerelle d'un lignage à un autre : la RTF doit faire cohabiter pour une même émission en studio, régie et caméras de chaque définition, ce qui ne va pas sans certains heurts, les équipes 819 se jugeant prioritaires sur celles de la basse définition dont l'arrêt est programmé pour 1958.


    Les téléspectateurs 441 lignes s'estiment lésés, n'ayant droit qu'à des émissions en studio et des films des années 30 alors que ceux en 819 lignes bénéficient du car de reportage pour des grands directs extérieurs (football, arrivée du Tour de France, Messe de Minuit...). En juillet 1952 en prévision du Couronnement, la BBC (qui émet en 405 lignes) et la RTF assistée de la Radio-Industrie mettent au point un "convertisseur de définition", en fait une caméra 819 lignes aux circuits de prise de vue modifiés, braquée sur l'écran à revêtement spécial anti-moirage d'un moniteur 405 lignes également modifié pour limiter l'effet de "lignage".


    Grâce à ce procédé les téléspectateurs du continent pourront ainsi voir un an plus tard en direct, converties de 405 en 819 et 441 lignes à Paris, et de 405 en 625 lignes à Breda pour les Pays-Bas et l'Allemagne de l'Ouest, le Couronnement en direct d'Elizabeth II le 2 juin 1953.


    Un tel convertisseur est aussitôt installé à demeure pour l'émetteur 441 lignes parisien, qui devient un simple relais du 819 lignes mais donne désormais satisfaction à tout le monde. Le voici, en service dans les locaux de la RTF rue Cognacq-Jay en 1954 :



    Le "convertisseur" pour l'émetteur 441 lignes de 1952 à 1956

    Document © Science et Vie


    Sur la gauche, on y voit les baies de contrôle de cet équipement qui comprend, au fond de la salle, le moniteur 819 lignes à tube à rémanence spéciale permettant à la caméra 441 lignes de ne pas reprendre le spot trop "en direct", ce qui lui aurait fait perdre le bénéfice de l'image complète en se retrouvant uniquement avec le "flying spot". D'un autre côté, la rémanence ne devait pas être trop longue pour éviter un effet de traînage des mouvements à l'écran.

    Sur la droite, la caméra 441 lignes dont le tube de prise de vue (vraisemblablement un orthicon) avait son système optique légèrement modifié pour éviter les effets de moirage à l'écran.


    Apparemment cette conversion optique se faisait mieux en lumière ambiante que dans l'obscurité.


    La station 441 lignes émet alors en bande I (vidéo 42 MHz, audio 46 MHz) en polarisation verticale, mieux adaptée aux courbures du relief et donnant un peu plus de portée à l'émetteur. La RTF connaît d'ailleurs ses téléspectateurs les plus éloignés : en Normandie, à Auxerre, mais aussi à... Vichy. Des vendeurs de téléviseurs garantissent même une réception stable sans un rayon de 150 km autour de l'émetteur parisien !


    Pour le capter il faut de très grandes antennes en "I" (simple dipôle) ou en "H" (dipôle + réflecteur), très voisines de celles utilisées pour la BBC à Londres (41,50 - 45 MHz), comme on peut le voir sur la partie gauche de l'illustration ci-dessous :




    A gauche : Document © northamptonaerials.tv
    A droite : capture d'écran du film "Papa Maman ma femme et moi" (1956)
    Document © Gaumont - Cocinor


    Dans la nuit du 2 au 3 janvier 1956, après une journée et une longue soirée d'élections législatives en direct, l'émetteur 441 lignes s'embrase au sommet de la Tour :




    Document © Ouest-France

    Il devait s'arrêter 2 ans plus tard, aussi la RTF renonce-t-elle à faire de coûteuses réparations pour un délai aussi court. On préfère indemniser les quelques centaines restantes de téléspectateurs concernés en leur attribuant diverses facilités pour remplacer leur poste devenu inutile, et les derniers "I" et "H" sont rapidement remplacés sur les toits parisiens par ces petites antennes 3 éléments au "trombone" caractéristique captant le 819 lignes en bande III que l'ont peut voir sur la partie droite de la photo ci-dessus. La polarisation horizontale est censée réduire les échos en milieu fortement urbanisé. C'est pourquoi les États-Unis et le Canada n'émettent qu'avec cette polarisation.

    Toutefois la bande I n'est pas abandonnée : cette même année 1956 voit la mise en service de l'émetteur 819 lignes de Caen Mt-Pinçon sur le canal F2 en polarisation horizontale, tandis qu'à l'est une éphémère station "Telesaar" profite du statut encore incertain de la Sarre pour émettre (quelques jours seulement d'ailleurs) sur ce même canal F2 en polarisation verticale depuis le bâtiment émetteur d'Europe 1 (nous y reviendrons un peu plus loin). Au sud, TMC fera aussi des essais sur le canal F2 en polarisation horizontale (apparemment avec l'ancien émetteur de Telesaar) pour tenter d'agrandir un peu sa zone de diffusion, la portée en bande I étant supposée supérieure à celle de la bande III. La chaîne monégasque finira par abandonner, ses émissions créant des interférences avec l'Italie.


    A la Tour Eiffel, le 441 lignes utilise deux jeux d'antennes séparés : pour le son (de simples câbles tendus verticalement) et, pour l'image, des bandes métalliques également tendues verticalement plus bas, autour de la plateforme. Bien sûr ces antennes n'avaient aucun gain, ce qui justifiait la grande puissance de l'émetteur : 30 kW, donnant en 1939 à la Tour le statut d'émetteur TV le plus puissant du monde :




    Détail des antennes au sommet de la Tour Eiffel en 1949




    De haut en bas : l'antenne 'tourniquet" 819 lignes (audio + vidéo),
    les antennes audio puis les antennes vidéo du 441 lignes

    Document © INA



    Gros plan sur les antennes vidéo du 441 lignes
    Document © INA

    Le très intéressant film muet ci-dessous a été tourné le... 1er janvier 1956, deux jours avant l'incendie de l'émetteur ! C'est dire son caractère historique très particulier.

    On y voit d'abord les antennes 441 et 819 lignes et les relais hertziens mobiles sur la 3ème plateforme de la Tour, puis la préparation de l'émission de 13h en direct "Télé-Paris" de Roger Féral et Jacques Chabannes qui recevaient des personnalités du Tout Paris. On reconnaîtra ici les comédiens Michel Simon, Françoise Rosay, Robert Manuel, Jacques Morel, Jeanne Sourza, Micheline Dax et Roger Pierre. Noter le "carton" de l'émission fixé devant l'objectif d'une caméra et le fonctionnement de celles-ci et de la régie :



    Document © INA
    Pour le télécharger: clic droit sur ce lien,
    choix "Enregistrer la cible..." (taille 24 Mo)
    .
    Si le débit de votre connexion le permet, une version en
    HD 720p
    avec la luminosité améliorée est disponible ici
    (également téléchargeable par clic droit - Taille 220 Mo)


    Retrouvés dans sa précieuse collection de documents historiques, voici des articles de la revue "Antennes" n° 31 et n° 60 de Télédiffusion de France transmis par kiki37. Le premier évoque les conditions particulières et les contraintes de diffusion liées à la Tour. Les suivants décrivent les équipements et la maintenance dans les années 80 :



    Document © TDF
    Collection kiki37





    Document © TDF
    Collection kiki37





    Document © TDF
    Collection kiki37

    Dernière modification par kiki37 ; 17/05/2022 à 20h58.
    Colorix
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  3. #3
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    Antennes d'émission TV en France dans les années 50-60 : Lille Beffroi et Bouvigny

    C'est à Lille, premier émetteur régional mis en service le 25 avril 1950, que nous allons consacrer la première étape de ce "Tour de France" dans les régions.

    En attendant la construction, quelques années plus tard, d'un centre doté d'un mât d'émission de grande hauteur, c'est d'abord depuis l'Hôtel de Ville de Lille que la télévision a fait ses premiers pas dans le Nord de la France.




    Copie d'un article de 1950 affichée dans le Beffroi de Lille.
    Les deux cercles du plan correspondent aux prévisions de couverture de réception,
    le plus petit étant la zone prévue en 1950. En réalité, l'émetteur sera reçu beaucoup
    plus loin en France comme en Belgique, en particulier après 1956
    .


    Télé-Lille a d'abord émis en autonome, puis à partir de juillet 1951, en relais de Paris, depuis le Beffroi de l'Hôtel de Ville de Lille (voir ici et ici dans le fil de discussion de notre ami Cricri)

    A l'époque cet édifice n'est pas vieux, il a été conçu par l'architecte Emile Dubuisson et inauguré en 1932, moins de 20 ans plus tôt :




    Document © Delcampe.net





    Particulièrement visible au sommet,
    la parabole captant le relais de Paris

    Document © Delcampe.net




    Document © Delcampe.net

    Haut d'un peu plus de 100 mètres (hauteur de certains émetteurs "classiques" en treillis métallique quelques années plus tard dans d'autres régions), il est reçu dans une bonne partie des départements du Nord et du Pas-de-Calais, et dans les régions frontalières de la Belgique toute proche grâce à des panneaux d'émission en bande III disposés sur la flèche au sommet. Le canal d'émission (F8A) et la polarisation (horizontale) sont les mêmes qu'à la Tour Eiffel, dont la zone d'émission n'atteint pas directement celle du Beffroi. Il y a donc un risque réduit d'interférences, même en extrémité des deux zones de réception.



    Capture d'écran vidéo document © INA

    En 1956, afin d'améliorer la réception dans les zones les plus éloignées des deux départements concernés, la RTF décide d'installer au sommet du beffroi un petit pylône sur lequel sont posés de nombreux panneaux d'antennes de grande puissance.



    Un document rare : les antennes de grande puissance
    permettant l'extension notable de la zone de réception
    après le triplement de la puissance de l'émetteur de 3
    à 20 kW crête-image en 1956. La vidéo de leur pose
    est disponible au
    point 3) dans la rubrique suivante.

    Document © Delcampe.net




    Une autre vue du beffroi avec sa grande antenne entre 1956 et 1960
    Document ©
    Delcampe.net




    Document © Delcampe.net

    L'esthétique du beffroi en souffre, mais le nouvel équipement apporte des surprises non négligeables : Télé-Lille est captée jusqu'à Gand et Bruges en Flandre, à Bruxelles, mais on rapporte aussi des cas de réception jusque sur les hauteurs de Namur ou même Liège.
    La télévision expérimentale belge INR ("Institut National de Radiodiffusion" belge) étant à peine naissante (1953), la RTF bénéficie d'une audience d'Outre-Quiévrain fidèle et très importante : "Rysel" (Lille, en flamand) propose même une émission en flamand le samedi après le programme de Paris.


    Voir aussi cette vidéo sur les travaux
    https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/...our-tele-lille
    Dernière modification par kiki37 ; 22/02/2023 à 17h27.

  4. #4
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    Télé-Lille : les débuts au Beffroi

    L'inauguration officielle de cette toute première station de télévision régionale remonte donc à 1950 : le ministre de l'Information de l'époque, Pierre-Henry Teitgen, était accompagné de toute la cohorte de "notables" de l'époque (vous remarquerez sur la première vidéo ci-dessous, les superbes moustaches d'un vieux monsieur et les chapeaux des dames).

    L'émetteur et les antennes provisoires étaient, nous l'avons vu, installés au sommet du Beffroi de l'Hôtel de Ville. Ces antennes avaient peu de rayonnement, mais permettaient quand même une réception correcte dans un rayon de 50 à 70 km alentours. Par la suite, un petit pylône sera installé tout au sommet du Beffroi pour accueillir des panneaux rayonnants à grande puissance permettant la réception dans une grande partie de la Belgique (jusqu'à Bruges, Gand puis Bruxelles, et même les hauteurs de Namur et Liège).


    Dès le départ on
    avait été retenu le même canal que celui de la Tour Eiffel, tout simplement parce que les premiers récepteurs 819 lignes, comme leurs aînés en 441 lignes, n'étaient pas encore équipés d'un "rotacteur" (sélecteurs de canaux), et les constructeurs et vendeurs de postes proposaient les mêmes appareils à Lille et à Paris.

    Quelques étages plus bas dans le Beffroi, tout le monde cohabitait tant bien que mal : petit studio et son personnel (cameraman, speakerine, journalistes, M. Météo, chansonniers et invités...), personnel de la régie (réalisateur, illustrateur sonore, etc) mais aussi de la baie de contrôle (techniciens audio et vidéo). Imaginez l'inconfort pour faire tenir tout ce petit monde !





    Le minuscule studio et son unique caméra
    accueillaient même la messe le dimanche dans le beffroi...

    Document © INA




    ... et le mobilier était le moins encombrant possible.
    Document © INA

    Le télécinéma était unique. Quand il fallait changer la bobine d'un film ou d'une émission "kinescopée" (enregistrée sur film) venant de Paris par le train (le faisceau hertzien ne sera établi qu'un an après), on improvisait un sketch ou une chanson pour faire patienter les téléspectateurs. La messe était dite sur un petit autel rangé ensuite dans un coin pour laisser la place à des chansonniers, etc. La mire elle-même était une photo sur un chevalet mobile devant l'unique caméra en service (on les voit dans le reportage ci-dessous). Le samedi soir, la station ira même jusqu'à proposer une émission en flamand pour les Belges qui n'auront leur propre télévision qu'en 1953 (lors du Couronnement d'Elizabeth II) et d'ailleurs limitée à la seule agglomération de Bruxelles jusqu'en... 1958. Le prestige de la station lilloise était tel en Belgique francophone, que pendant longtemps les Wallons continueront de dire "Lille" pour désigner la Première Chaîne de l'ORTF...

    Bref, la Préhistoire de la télévision régionale, qui si vous avez l'occasion de visiter votre station régionale France 3 lors des Journées du Patrimoine, vous laissera rêveur face à l'incroyable évolution de la technique depuis 60 ans ! (à Nantes, devant le nombre incroyable de moniteurs, de baies de commandes etc, le tout dans une ambiance feutrée dans une semi-pénombre, on avait l'impression d'être à bord d'un sous-marin nucléaire !)


    1) L'inauguration de Télé-Lille le 27 avril 1950 :




    Cliquer dans l'image ou ici pour lire la vidéo (durée 4mn)
    Si votre connexion est trop lente, téléchargez-la : clic droit
    ici
    puis
    choix "Enregistrer la cible..." (taille du fichier 25 Mo)
    Document © I.N.A.


    2) La préparation du JT régional du 29 juin 1951 :





    Noter la grande jeunesse de Jean Ruelle,
    le caméraman tout de blanc vêtu

    Cliquer dans l'image ou ici pour lire la vidéo (durée 2'20)
    Si votre connexion est trop lente, téléchargez-la : clic droit
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    Document © I.N.A.



    3) La pose des antennes de grande puissance en janvier 1956

    Pour améliorer la réception dans l'ouest des départements du Nord et du Pas-de-Calais, mais aussi en Belgique, les anciennes antennes sont remplacées par des panneaux rayonnants de grande puissance installés sur un petit pylône érigé au sommet du Beffroi :



    La pose délicate des imposants panneaux rayonnants en 1956.
    Cliquer dans l'image ou ici pour lire la vidéo (durée 7'45)
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    ici
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    Document © I.N.A.


    4) Mai 1960 : la télévision quitte le Beffroi pour Bouvigny


    Le grand centre émetteur de Bouvigny remplace désormais le Beffroi, mais aussi le petit relais local du château d'eau d'Amiens-Coisy, grâce à deux gros émetteurs de 20 kW de puissance crête-image, l'un dirigé vers le nord (canal F 8A-H) et l'autre vers le sud (canal F11-V) pour arroser la Picardie. Un hélicoptère sert à démonter les antennes devenues inutiles au sommet du Beffroi après ses dix années de bons et loyaux services :





    La dépose tout aussi spectaculaire des antennes
    est cette fois effectuée à l'aide d'un hélicoptère.

    Cliquer dans l'image ou ici pour lire la vidéo (durée 5mn)
    Si votre connexion est trop lente, téléchargez-la : clic droit
    ici
    puis
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    Document © I.N.A.


    Entre temps, la station de télévision avait déménagé en 1957 auprès de la radio régionale, dans les locaux de la R.T.F. boulevard de la Liberté :




    L'immeuble de la RTF qui avait accueilli les personnalités pour l'inauguration en 1957

    Elle y bénéficiait désormais d'installations spacieuses permettant l'utilisation de plusieurs caméras :


    La photo ci-dessus fait partie de la très intéressante page du blog lelensoisnormand.unblog.fr consacrée au "Magazine du Mineur" diffusé par Télé-Lille : n'hésitez pas à aller la visiter ici ainsi que les autres chapitres de ce site consacré à cette belle région du Nord.

    D'autres commentaires et photos sont également accessibles sur ces pages de l'intéressant forum
    TNT62 Nord-Pas de Calais à l'appui de ces mêmes vidéos que je leur ai fait partager :

    1) http://tnt62.xooit.fr/t6703-Inaugura...avril-1950.htm

    (l'inauguration du 27 avril 1950)

    2) http://tnt62.xooit.fr/t6784-Tele-Lil...-juin-1951.htm

    (les préparatifs du JT du 29 juin 1951)

    3) http://tnt62.xooit.fr/t8167-T-l-Lill...-puissance.htm

    (la pose d'antennes de grande puissance en 1956)

    4) http://tnt62.xooit.fr/t8168-T-l-Lill...r-Bouvigny.htm

    (la TV quitte le Beffroi pour Bouvigny en 1960)

    Vous y trouverez d'utiles informations et commentaires de membres de ce forum qui ont connu l'époque héroïque de "Télé-Lille" , mais aussi de la Télévision Belge durant leur enfance.

    Dernière modification par kiki37 ; 30/03/2022 à 12h12.
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    Louis Marie Foratier

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  5. #5
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    Le cas particulier de la Picardie

    En 1956 le Nord et le Pas-de-Calais sont donc en grande partie à la portée du Beffroi de Lille.

    En Picardie toutefois, le sud de la région capte Paris et le Nord reçoit Lille, mais Amiens et ses environs se plaignent d'être laissés de côté, seul un petit relais provisoire de 50 watts, installé sur le tout nouveau château d'eau de Coisy en juillet 1958, est reçu dans l'agglomération d'Amiens :




    Cliquer sur l'image ou sur le lien ci-dessous
    pour ouvrir la page
    Google Street View
    Le château d'eau de Coisy, construit en 1958 et aussitôt
    utilisé par la
    RTF jusqu'à la mise en service de l'émetteur
    de Bouvigny sur le même canal F11-V en décembre 1959.
    Modernisé, il est maintenant utilisé pour la téléphonie
    mobile avec un
    pylônet et surnommé "La Tour Bleue".
    Capture d'écran © Google Street View


    La RTF ne parvient pas à retenir un emplacement satisfaisant pour couvrir la Somme et l'Aisne, tandis que le site de Bouvigny-Boyeffles est choisi pour remplacer le beffroi de Lille.



    Document © Delcampe.fr
    et
    © Modern Photo Sains (1960)



    Avec en cadeau une colorisation "maison" de la photo ci-dessus :




    Finalement, c'est ce même site inauguré en novembre 1959 qui hébergera, fait unique à la RTF, deux émetteurs 819 lignes bande III avec deux polarisations différentes : le canal F8A émettant en horizontal vers le Nord-Pas de Calais, et le canal F11 émettant en vertical vers la Somme et l'Aisne.
    (NB : jusqu'en 1956, la Tour Eiffel avait eu elle aussi deux émetteurs avec deux polarisations différentes, mais avec deux standards différents et sur deux bandes différentes : en 441 lignes en bande I à polarisation verticale, et en 819 lignes en bande III en polarisation horizontale)
    :


    Cliquer sur l'image ou
    ici pour afficher la carte en plus grande taille

    Document © Revue technique Le Haut-Parleur - 1961
    Collection doctsf.com

    Quelques années plus tard, en 1964, Bouvigny sera le premier grand centre émetteur de province (une fois de plus !) à bénéficier de l'arrivée de la Deuxième Chaîne de l'ORTF (Lyon l'ayant eu en même temps que Paris, mais seulement sur sa mini-Tour Eiffel de Fourvière, reçue seulement dans la ville et sa banlieue). Peut-être plusieurs facteurs ont-ils contribué à lui donner cette préférence : sa proximité de la Belgique déjà utilisatrice du 625 lignes flamand (en VHF certes, mais à polarité d'image positive et à porteuse audio en AM comme le 625 lignes français, et non pas en polarité négative et son FM), pour lequel de nombreux téléviseurs"ch'tis" multistandards étaient déjà en mesure de capter la nouvelle chaîne par simple adjonction d'un tuner et d'une antenne UHF. Mais, peut-être aussi, les compétences particulières du personnel technique lillois qui s'était illustré en juin 1953 en assurant le centre nodal et de répartition, avec conversion des images anglaises à 405 lignes du Couronnement, en images à 819 lignes vers Paris, et en 625 lignes vers la Belgique, les Pays-Bas, l'Allemagne et le Danemark... une prouesse technique à l'époque.

    Haut de ses 300 mètres, Bouvigny fut donc le premier grand pylône français à être surmonté d'un cylindre d'une vingtaine de mètres contenant les antennes UHF diffusant la "Deux" sur une zone de réception moins grande qu'en VHF :



    Document © Télé 7 Jours 1964





    Bouvigny-Boyeffles, surmonté de sa nouvelle antenne UHF en 1964
    Document © Delcampe.fr

    L'émetteur de Bouvigny sera complété, pour ses émissions en UHF, par des émetteurs "intercalaires" comme celui-ci, sur le Mont des Cats près de Dunkerque...



    Document © Delcampe.fr

    ... et au Mont-Lambert, près de Boulogne (qui complétait déjà la zone de réception de la "Une" sur le canal F4-V en bande I depuis septembre 1959), mais aussi à Maubeuge (Rousies), Valenciennes (Marly) et, pour le programme régional d'Amiens, à Hirson (Landouzy) et à Abbeville (Limeux).

    Tous ces émetteurs "intercalaires" sont uniquement équipés pour la radio FM et la TV en UHF. Leurs emplacements sont soigneusement choisis pour "coller" au mieux avec les limites administratives qui aboutiront un jour à nos actuelles régions, et pour lesquelles l'ORTF a mis progressivement en place des C.A.T. (Centres d'Actualités Télévisées) dont ces émetteurs assureront une couverture optimale, tandis que les grands centres VHF comme Bouvigny avaient eu pour objectif premier de couvrir un maximum de population avec la plus grande zone de réception possible.


    A la fin des années 80, la proximité de la Belgique, de l'Angleterre et des Pays-Bas a empêché Bouvigny d'accueillir des émetteurs pour La Cing et TV6 (puis M6), qui durent se contenter longtemps d'un émetteur local à Lambersart, limité à l'agglomération lilloise.


    Depuis, le passage au tout numérique a permis à la station de bénéficier du même nombre de chaînes que les autres grands centres émetteurs de province.


    Quant à la Picardie, elle possède ses propres émetteurs depuis 1969 à Saint-Just en Chaussée pour couvrir l'Oise et la Somme, à Limeux pour la région d'Abbeville, et, pour l'Aisne, à Hirson Landouzy mais aussi à Villers-Cotterets (Fleury) le tout premier émetteur UHF français à utiliser la polarisation verticale (voir ici).


    Dans un prochain article, après un crochet par la Belgique et son 819 lignes spécifique, nous partirons pour l'Alsace dont le premier émetteur, provisoire, a fêté ses 60 ans le 30 septembre 2013. Bien que nous disposions de moins d'illustrations et de détails, nous découvrirons pourquoi la priorité a été donnée à cette région plutôt qu'à Lyon, initialement prévue pour le troisième émetteur français, mais qui dut attendre un an de plus pour bénéficier de la télévision.

    Dernière modification par kiki37 ; 08/04/2022 à 18h48.
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  6. #6
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    Antennes d'émission TV en France dans les années 50-60 : le 819 lignes aussi en Belgique

    De l'autre côté de la frontière ("Outre-Quiévrain"), la télévision lilloise fit la conquête de nombreux téléspectateurs belges, autant en Wallonie qu'en Flandre grâce à ses émissions régionales dans les deux langues.

    Bien que l'I.N.R. (Institut National de Radiodiffusion) belge n'ait pas encore arrêté ses choix en normes techniques, il était évident que pour les belges francophones le 819 lignes s'imposait de lui-même. Mais, très rapidement, il n'en allait pas de même pour les néerlandophones lorsque la télévision hollandaise, captée dans presque toute la Flandre fit ses débuts en 625 lignes le 2 octobre 1951.

    Il fallait trouver un compromis pour satisfaire tout le monde, et c'est ainsi que sont nées deux normes que seule la définition différenciait : le "819 lignes belge" (ou "819 lignes à bande étroite", norme F) pour les émissions en français, et le "625 lignes belge" (norme C). Pour le reste, la polarité vidéo était positive et le son en modulation d'amplitude, comme en France.

    Les premières émissions seront expérimentales et d'abord réalisées en circuit fermé depuis deux studios de radio reconvertis, pour chacune des deux langues, dans l'immeuble de la place Flagey à Bruxelles, qui héberge à la fois l'I.N.R. francophone et le N.I.R. (Nationaal Instituut voor de Radio-Omroep) néerlandophone :




    Années 50 : le logo bilingue français-flamand (INR-NIR) de
    l'Institut National de Radiodiffusion belge, ancêtre commun
    aux actuelles RTBF francophone et VRT néerlandophone.
    Document © ouderadio.be


    Dans le même temps, le dôme du Palais de Justice de Bruxelles reçoit des nappes d'antennes bande III orientées vers le Beffroi de Lille pour assurer, le 2 juin 1953, le relais du Couronnement d'Elizabeth II en direction des Pays-Bas et de l'Allemagne de l'Ouest :

    1ère étape : la pose des antennes d'émission provisoire sur le Dôme du Palais de Justice de Bruxelles en 1953 (captures vidéo) :




    Les antennes captant l'émetteur R.T.F. de Lille-Beffroi
    sur le Dôme du Palais de Justice de Bruxelles
    Document © Sonuma (INA belge)




    L'échafaudage pour la pose de l'antenne émettrice
    Document © Sonuma (INA belge)

    Les ouvriers posent l'antenne d'émission super-tourniquet en Bande III :





    1953 - 1958, les cinq premières années de la télévision en Belgique.
    Après les débuts expérimentaux au Palais de Justice de Bruxelles,
    les deux chaînes s'équipent de puissants émetteurs régionaux.
    Cliquer sur l'image ci-dessus pour voir la vidéo
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    Document © Sonuma (INA belge)




    Capture d'écran vidéo © Sonuma (INA belge)

    Grâce à cette installation provisoire, la Belgique, qui devait initialement se limiter au relais
    du signal de Lille vers les Pays-Bas et l'Allemagne, va pouvoir diffuser elle aussi le Couronnement d'Elizabeth II et faire partie des premiers pays participant à cette toute première Eurovision du 2 juin 1953.

    Cette double installation provisoire (une francophone, une néerlandophone) va durer du 31 octobre 1953, date officielle du lancement de la "Télévision Expérimentale Belge", jusqu'à l'Exposition Universelle de 1958. Les deux émetteurs du Palais de Justice, d'une puissance apparente rayonnée de 1 kW, sont reçus par environ 6500 téléviseurs dans un rayon d'environ 40 km autour de la capitale.

    Le N.I.R. émet en 625 lignes sur le canal E10-H en norme C, qui n'a avec la norme B, celle des pays voisins (Pays-Bas, R.F.A.), que la définition et les fréquences d'émission en commun.

    L'I.N.R. émet en 819 lignes à bande étroite sur le canal E8-H en norme F, qui sera d'ailleurs reprise par Télé-Luxembourg en 1955 (nous y reviendrons dans l'étape consacrée à la Lorraine).

    Affectant la qualité de l'image vidéo, ce choix d'un canal de 7 MHz au lieu de 14 MHz est justifié par le fait de la coexistence forcée des deux chaînes nationales belges qui, même si elles ne sont diffusées chacune que dans leur zone linguistique respective, doivent néanmoins cohabiter dans plusieurs zones de réception commune, mais aussi avec les chaînes étrangères reçues en de nombreux endroits de Belgique : la France au sud, l'Allemagne de l'Ouest (puis le Luxembourg) à l'est, les Pays-Bas au nord, et même la BBC et ITV sur la côte belge.

    Ceci a pour résultat de généraliser assez rapidement les récepteurs multistandards, certes très coûteux ("les plus chers du monde" diront les Belges) mais donnant, déjà, un choix important de programmes là où la plupart des pays voisins ne disposent que d'une seule chaîne.

    Progressivement le réseau va s'étendre, avec trois "grosses" stations principales près de Bruxelles pour les deux chaînes, à Liège pour l'I.N.R. et près d'Anvers et Gand pour le N.I.R., ainsi que l'on a pu le voir dans la vidéo qui précède :


    2ème étape : Wavre - Overijse remplace le Palais de Justice en 1958 :




    Le pylône autoporteur de Wavre diffuse désormais
    les deux programmes belges du haut de ses 145 mètres
    Capture d'écran vidéo © Sonuma (INA belge)





    Les antennes de 100 kW PAR. Noter la différence des panneaux en
    fonction des diagrammes de rayonnement, différents selon la chaîne.
    Canal E8-H émissions françaises en 819 lignes vers l'est et le sud (Wallonie)
    Canal E10-H émissions flamandes en 625 lignes vers le nord et l'ouest (Flandre)
    Capture d'écran vidéo © Sonuma (INA belge)


    Liège - Ougrée (Wallonie - 1958) :




    A gauche sur le château d'eau, l'ancien émetteur provisoire du Bol d'Air, de 1954.
    Au pied du nouveau pylône, des antennes qui seront posées à son sommet.
    Capture d'écran vidéo © Sonuma (INA belge)




    Le nouveau pylône liégeois avant la pose de ses antennes
    Capture d'écran vidéo © Sonuma (INA belge)





    Le montage de l'antenne Super-tourniquet bande I (canal E3-H)
    Capture d'écran vidéo © Sonuma (INA belge)



    Capture d'écran vidéo © Sonuma (INA belge)


    Aalter / Ruiselede près de Gand et Bruges (Flandre - 1958) :




    La base du pylône autoporteur de Aalter - Ruiselede
    Capture d'écran vidéo © Sonuma (INA belge)





    Les imposantes antennes bande I (canal E2-H - 100 kW PAR) en attente de montage
    Capture d'écran vidéo © Sonuma (INA belge)





    Capture d'écran vidéo © Sonuma (INA belge)

    Ces émetteurs principaux seront par la suite complétés par des stations de moindre puissance, notamment à Anlier près d'Arlon et de la frontière avec le Luxembourg, sur le canal E11-H (10 kW PAR) ou Froidmont près de Tournai et de Lille, sur le canal E7-V (2 kW PAR).

    Dès 1965, ainsi que le confirme le World TV Radio Handbook de 1966, la R.T.B. abandonne le 819 lignes pour le 625 lignes norme C déjà utilisé par la B.R.T. flamande (Belgische Radio en Televisie - Radio Télévision Belge). Toutefois, elle continue de relayer des émissions de la Première Chaîne ORTF en 819 lignes sans les convertir, ce qui amènera les constructeurs de téléviseurs à mettre au point un système de "bascule" automatique de définition pour éviter aux téléspectateurs de se lever pour aller à chaque fois changer celle-ci sur leur téléviseur non muni d'une télécommande avec changement de lignage.

    L'arrivée de la couleur (système PAL) a lieu le 1er janvier 1971 sur un nouveau réseau UHF en norme H, le réseau VHF norme C continuant d'émettre en noir et blanc jusqu'en 1977 du fait de l'incompatibilité de ses caractéristiques pour diffuser le système PAL. Le réseau UHF sera alors étendu et transformé en deuxième programme sous le nom de RT-Bis, en fait sous la forme de dédoublement des soirées avec la chaîne VHF certains jours de la semaine, pour devenir par la suite une chaîne nouvelle à part entière sous le nom de Télé 2 puis de Télé21.

    Le reportage ci-dessous, réalisé le 22 mai 1964 par la R.T.B. (Radio Télévision Belge, héritière de l'I.N.R. en 1960) nous montre, sans le savoir, un "nouveau métier" qui ne fera pas long feu : les installateurs d'antennes, sollicités par des Belges avides de nouveaux programmes, risquent souvent leur vie en érigeant des équipements de taille impressionnante. Ils ignorent à cette date que la télédistribution chassera bientôt des toits toutes ces antennes, en se généralisant très rapidement dans tout le pays :


    Un reportage original de la R.T.B. sur les installateurs d'antennes
    en 1964. Ceux-ci ignorent que dans peu de temps la télédistribution
    va les chasser des toits en se généralisant dans toute la Belgique.
    Cliquer sur l'image ci-dessus pour voir la vidéo
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    Document © Sonuma (INA belge)

    Apparue à Liège dès 1962, la télédistribution désormais universelle en Belgique a chassé les nombreux râteaux des toits et normalisé la réception de toutes les chaînes, particulièrement nombreuses.

    Témoin cette "Rue de la Porcelaine" à Anderlecht, vue avec 60 ans d'écart...




    "Rue de la Porcelaine" à Anderlecht, dans la banlieue sud de Bruxelles.
    Carte postale de 1953 env. lorsque la
    RTF de Lille était reçue depuis 1950
    avec des antennes
    "grande distance" (notamment la "Yagi double nappe"
    à gauche) tandis que les petites captaient l'
    INR émis du Palais de Justice.

    Document © Delcampe.net




    Cette même rue d'Anderlecht soixante ans après, en 2013. Elle n'a pas
    beaucoup changé (voir la vieille palissade de bois au premier plan !),
    si ce n'est la disparition de toutes les antennes sur les toits... Le câble,
    universel en Belgique, les a chassées du paysage dès les années 60.

    Document © Google Street View


    ... et cette "Rue de la Douane" marquant la frontière franco-belge dans l'agglomération d'Halluin :




    Halluin: la "rue de la Douane" marque la frontière entre la Belgique à gauche et la France à droite.
    Impossible de se tromper : aucune antenne râteau à gauche, et une haute forêt à droite.
    Seule exception côté belge, une parabole vraisemblablement utilisée pour capter
    de rares chaînes étrangères non disponibles en télédistribution.
    Cliquer dans l'image ou
    ici pour l'afficher en grande taille
    Document © Google Street View


    les normes de la télévision belge en 1952 ► sous ce lien
    Dernière modification par kiki37 ; 08/04/2022 à 19h05.
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  7. #7
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    Antennes d'émission TV en France dans les années 50-60 : l'Alsace a la priorité !

    Juin 1953 : panique dans les hautes sphères de la RTF !

    Alors que tout le monde s'est réjoui de la pleine réussite de la diffusion du Couronnement dans plusieurs pays ne partageant pas les mêmes normes techniques, une ombre au tableau vient souffler un vent d'inquiétude chez les dirigeants parisiens : les Alsaciens achètent des téléviseurs allemands ne fonctionnant qu'en 625 lignes au standard d'outre-Rhin, totalement incompatible avec le 819 lignes français !




    Cet article très "cocorico" de l'hebdomadaire catholique vendu dans les églises et ancêtre de
    "Télérama" défend maladroitement la R.T.F. face à la T.V. allemande.
    Cette dernière sera
    d'ailleurs présente à temps pour que les Alsaciens voient le couronnement d'Elizabeth II.

    Document © Télérama

    Alors qu'à Paris, les vendeurs de téléviseurs se sont frottés les mains de satisfaction grâce au Couronnement, en vendant des milliers de postes ces derniers mois, on vient d'apprendre que certains de leurs collègues, à Strasbourg, en ont fait tout autant grâce à l'émetteur récemment installé près de Baden-Baden, et parfaitement reçu dans le Bas-Rhin !


    Les Strasbourgeois ont donc pu regarder le Couronnement, mais pas sur la Télévision Française, car celle-ci n'a aucun émetteur en service dans l'Est de la France. Et les programmes de l'ARD (
    Arbeitgeminschaft der öffentlichrechtlichen Rundfunkanstalten Deutschlands, "Communauté de travail des organismes officiels de Radiodiffusion d'Allemagne") sont, aussi, très attrayants : Hambourg, Berlin, Münich... tous les Länder se partagent successivement l'antenne nationale, apportant une grande variété dans la grille des programmes. Les postes allemands commencent à entrer dans les foyers alsaciens, et bientôt lorrains si la Sarre, bien que sous mandat français depuis la Libération, s'équipe elle aussi d'un émetteur relayant l'Allemagne...

    "Ils n'auront pas l'Alsace et la Lorraine !"
    ... Ce véritable casus belli hérité de la défaite de 1870 ressurgit à l'état-major de la RTF. Le directeur technique n'en est-il pas le (déjà vieux) Général Leschi ?



    Inauguration de Télé-Lille : à gauche, le Général Leschi,
    Directeur Technique chargé du développement du réseau TV de la
    RTF

    Document © INA

    Alors qu'on avait prévu de donner la priorité d'abord à Lyon, puis à Marseille , les deux agglomérations les plus importantes de province, la mise en chantier d'un émetteur de télévision provisoire à Strasbourg est lancée de toute urgence.

    Un vaste terrain est trouvé rue Lauth, qui accueillera une Maison de la Radio et de la Télévision, et l'émetteur de télévision provisoire. Même s'il n'est pas reçu dans tout le Bas-Rhin, il empêchera au moins l'hémorragie de continuer à attirer les Alsaciens vers l'influence allemande voisine. Car nous ne sommes qu'en 1953, les téléviseurs reçoivent, soit les 819 lignes français avec le son en modulation d'amplitude et la polarité positive de la vidéo, soit le 625 lignes allemand (déjà adopté par les Pays-Bas et l'Italie) au son en FM avec polarité négative de la vidéo. Les téléviseurs multistandards sont rares et chers. C'est donc la guerre à l'audience sur fond de normes techniques ! Sus à l'envahisseur !


    L'émetteur alsacien avec sa tour autoporteuse d'une soixantaine de mètres de hauteur, est donc inauguré dès le mois d'octobre 1953, tout le monde a mis les bouchées doubles :


    Inauguration de la station régionale de Strasbourg
    Si votre navigateur n'affiche pas la vidéo, faire un
    clic droit
    ici (choix "Enregistrer la cible...") pour
    la visionner sur votre disque dur (taille 1,5 Mo
    )

    Document © INA
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  8. #8
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    Fonctionnant d'abord en autonome comme Lille, Strasbourg reçoit par train de Paris les émissions kinescopées (enregistrées sur film à partir d'un moniteur équipé d'un tube cathodique spécialement adapté), en particulier le journal télévisé de la veille. Il faut en effet laisser le temps aux PTT, alors seuls autorisés à tracer des "câbles hertziens", le temps de relier Paris à Strasbourg via de nombreuses tours relais :



    La tour de relais hertzien de Villers-Cotterets, assurant à la fois
    le relais de Paris vers Lille et vers Strasbourg. Noter
    les logements
    pour le personnel dans les étages inférieurs de la tour.
    Document © Delcampe.fr



    (image non retrouvée)

    La tour hertzienne de La Hoube près de Dabo, dans les Vosges, entre Metz et Strasbourg.
    Document © Delcampe.fr





    Les équipements n'étant pas automatisés, les personnelslogent
    sur place, ici à La Hoube dans un petit bâtiment
    au pied de la tour.
    Document © Delcampe.fr
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  9. #9
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    Certains relais hertziens de moindre importance ne nécessitent pas une intervention
    humaine permanente, comme ici sur le Haut-Barr dominant Saverne, en Alsace.

    Document © Delcampe.fr

    Le 25 décembre 1953, la liaison hertzienne avec Strasbourg est mise en place avec, en prime, la possibilité d'envoyer des images d'Alsace vers Paris. Comme Lille, Strasbourg a le privilège de proposer des émissions régionales en complément au relais du programme national, y compris en dialecte alsacien.

    L'émetteur a une particularité technique notable : il émet sur le canal F5, en polarisation horizontale. Or ce canal F5 est "hors bande" : alors que les fréquences allouées à la télévision sont normalement comprises entre 175 et 230 MHz, le 819 lignes gourmand en fréquences (11,15 MHz de largeur de bande au lieu de 7 MHz pour les émetteurs 625 lignes !) a du recourir à deux astuces : la première, c'est le recours aux fréquences comprises entre 162 et 175 MHz, soit en gros la place pour un canal supplémentaire.

    L'autre astuce, ce sont les canaux "inversés", particularité essentiellement française, avec les canaux "impairs" en "infradyne" et les canaux "pairs" en "supradyne"...

    Pour le profane, ces termes barbares veulent tout simplement dire que pour une bande de fréquences à peu près identique, la porteuse vidéo est soit d'une fréquence inférieure ("infradyne"), soit supérieure ("supradyne") à la fréquence de la porteuse audio. En jouant aussi sur les polarisations d'antennes, on peut faire voisiner deux émetteurs ayant à peu près les mêmes fréquences, mais les porteuses son étant totalement à l'opposé l'une de l'autre, et les porteuses vidéo légèrement différentes, et la polarisation d'antenne étant un barrage efficace contre d'éventuelles interférences mutuelles, la réception, même dans les zones limites de réception commune, permettait de capter l'un ou l'autre des émetteurs sans trop de problèmes.


    Avec ses 164 MHz de fréquence vidéo, et ses 175,15 MHz de fréquence audio, le canal F5 de Strasbourg est donc en "infradyne". Un peu plus tard, le 31 juillet 1956, l'émetteur voisin de Metz-Luttange partagera la même bande de fréquences, mais sur le canal F6 "supradyne", avec la vidéo sur 173,40 MHz et l'audio sur 165,25 MHz. Tous deux seront pourtant en polarisation horizontale, mais, même lorsqu'en 1964 l'émetteur de Nordheim aura une portée plus grande, et donc une zone de réception commune à mi-chemin avec Luttange, apparemment le voisinage se passera sans trop de difficultés...


    Dominant la Maison de la Radio-Télévision, l'émetteur de la rue Lauth dans les années soixante...



    Document © Delcampe.fr



    (image non retrouvée)
    Document © Delcampe.fr


    ... et de nos jours, vu depuis la rue Lauth :




    Cliquer sur l'image ou le lien ci-dessous pour ouvrir la page Google Street View
    Document © Google Street View
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  10. #10
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    En 1964, afin d'améliorer la réception dans le nord du Bas-Rhin, le tout nouvel ORTF met en service un émetteur régional plus puissant et plus performant, grâce à un pylône de plus de 130 mètres sur les hauteurs de Nordheim, à l'ouest de Strasbourg. Nombreux sont ceux qui doivent alors réorienter leurs "râteaux" vers le nouvel émetteur :



    Le centre émetteur TDF de Strasbourg-Nordheim
    Document ©
    structurae.info





    Noter le pylône autoporteur séparé assurant les
    liaisons hertziennes avec celui de la rue Lauth.

    Document ©
    structurae.info





    Document © structurae.info

    L'arrivée prévue de la Deuxième Chaîne pour le début de 1965 a sans doute contribué à ce choix. Avec son pylône trop petit et son emplacement peu élevé, l'émetteur de la rue Lauth ne pouvait donner des résultats satisfaisants pour une diffusion en UHF qui porte bien moins loin que la VHF. Dans le nord du Bas-Rhin, il faudra d'ailleurs installer un petit émetteur intercalaire à Wissembourg, au Col du Pigeonnier, pour améliorer la réception de la radio FM et de la TV en UHF :



    L'émetteur intercalaire FM et UHF de Wisembourg
    sur les hauteurs du Col du Pigeonnier.

    Document ©
    structurae.info

    L'ancien pylône rue Lauth sera néanmoins conservé pour les liaisons hertziennes entre la station régionale de la Place de Bordeaux et ses émetteurs, mais aussi avec Paris et avec l'Allemagne voisine.
    Dernière modification par kiki37 ; 08/04/2022 à 15h49.
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